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Impact de l’ozone troposphérique importé sur la mortalité prématurée en Europe

L’exposition aux niveaux actuels d’ozone troposphérique (O3) en Europe est l’une des principales causes de mortalité prématurée due à la pollution atmosphérique. Une étude menée par l’Inserm, le Barcelona Institute for Global Health (ISGlobal), et le Barcelona Supercomputing Center – Centro Nacional de Supercomputación (BSC-CNS), a quantifié pour la première fois l’impact de l’exposition à l’O3 sur la mortalité européenne, et plus précisément l’impact de l’O3 dit « importé », c’est-à-dire dont la production émane d’autres pays. L’étude estime le nombre total de décès liés à l’ozone en Europe au cours de la période 2015-2017 à 114 447, dont 88,3 % seraient liés à l’exposition à l’ozone importé. Ces résultats, publiés dans Nature Medicine, soulignent la nécessité d’actions coordonnées à l’échelle locale, continentale et mondiale de la part de tous les pays pour réduire les concentrations d’O3 et leur impact sur la santé.

L’ozone troposphérique est un polluant atmosphérique nocif formé dans la troposphère par l’interaction du rayonnement solaire avec plusieurs gaz précurseurs, principalement des oxydes d’azote (NOx) et des composés organiques volatils (COV) provenant de sources naturelles et anthropiques. Des niveaux élevés d’O3 sont associés à une série d’effets néfastes sur la santé respiratoire, notamment l’aggravation de l’asthme, la bronchopneumopathie chronique obstructive, la diminution de la fonction pulmonaire et les infections, conduisant dans les cas les plus graves à l’hospitalisation et au décès.

Les scientifiques de l’Inserm, d’ISGlobal et du BSC-CNS ont pour la première fois mesuré l’impact d’une exposition à l’O3 « importé » d’autres pays sur la mortalité européenne. Ces mesures ont été rendues possibles grâce à l’analyse des données 2015-2017 provenant de 35 pays européens[1].

Pour suivre les concentrations d’O3, l’étude a utilisé le système de qualité de l’air CALIOPE développé au BSC-CNS, qui couvre l’Europe. Ce système suit à la fois l’O3 et ses précurseurs (c’est-à-dire les NOx et les COV) qui sont formés ou émis dans chaque région. Par ailleurs, pour obtenir des données en dehors de la zone d’étude, les scientifiques ont utilisé une approche de modélisation qui leur a permis de suivre la dispersion et le transport des polluants atmosphériques sur de longues distances. La méthode a également pris en compte les émissions provenant de la terre et de la mer. L’analyse s’est appuyée sur les données de la saison chaude (de mai à septembre) au cours de laquelle les valeurs d’exposition à l’O3 sont les plus élevées. Les données relatives aux décès enregistrés sur la période proviennent d’Eurostat.

Cette étude a permis d’aboutir à quelques résultats clés :

Les scientifiques ont mené un travail statistique qui leur a permis d’estimer à 114 447 le nombre de décès attribuables à l’O3 entre 2015 et 2017, sur l’ensemble de la zone des 35 pays européens considérés.

Selon cette étude, 88,3 % de ces décès seraient liés à une exposition à l’O3 en provenance d’autres pays ; 11,7 % des décès seraient relatifs à une exposition d’origine nationale.

Plus précisément, 20,9 % de tous les décès observés sont liés à de l’ozone ayant son origine dans les autres pays européens analysés, 60,2 % à de l’ozone provenant en dehors de l’Europe et les 7,2% restant à de l’ozone issu du transport maritime.

L’étude a également montré qu’au sein de l’Europe, l’O3 attribué à la mortalité émanait majoritairement des pays européens les plus industrialisés. Par exemple, l’O3 en provenance de France a eu un impact significatif sur ses pays frontaliers tels que le Luxembourg (32,3 % des décès attribuables à l’O3), la Suisse (29,3 %), la Belgique (24,4 %) ou encore l’Espagne (16,8 %). L’O3 en provenance d’Allemagne a également eu un impact significatif sur les pays voisins tels que le Luxembourg (24,2 % des décès), la République tchèque (23,3 %) ou les Pays-Bas (21,5 %).

« Notre étude souligne la nécessité d’une quantification systématique des contributions nationales, européennes et extracommunautaires des niveaux de pollution de l’air et de leurs effets sanitaires associés. L’objectif est de mettre en place des mesures de réglementation et d’atténuation pour lutter contre l’effet des polluants atmosphériques tels que l’O3 qui sont facilement transportés au-delà des frontières », explique Hicham Achebak, chercheur à l’Inserm (France) et à l’ISGlobal (Espagne).

Enfin, ce travail rappelle l’importance de lutter contre le réchauffement climatique : « Le réchauffement climatique renforcera les conditions de formation de l’O3 troposphérique à l’avenir, car les mécanismes photochimiques de formation de l’O3 sont favorisés pendant les vagues de chaleur et les périodes de fort rayonnement solaire. Lutter contre le réchauffement climatique est nécessaire pour améliorer durablement la qualité de l’air. Il sera aussi important de faire d’autres recherches pour identifier aux mieux les sources de pollution qui contribuent le plus à la mortalité, que ce soit l’O3 ou d’autres polluants dont les effets sont tout aussi délétères sur la santé », conclut Hicham Achebak.

[1]L’analyse de 35 pays européens correspond à la couverture d’une population totale d’environ 530 millions de personnes.

Sources

Geographic sources of ozone air pollution and mortality burden in Europe

Hicham Achebak1-2, Roger Garatachea3, María Teresa Pay3-4, Oriol Jorba3, Marc Guevara3, Carlos Pérez García-Pando3,5*, Joan Ballester2*

  1. Inserm, France Cohortes, Paris, France.
  2. ISGlobal, Barcelona, Spain.
  3. Barcelona Supercomputing Center (BSC), Barcelona, Spain.
  4. Department of Genetics, Microbiology and Statistics, University of Barcelona (UB).
  5. Catalan Institution for Research and Advanced Studies (ICREA), Barcelona, Spain.

*Contributed equally

Elliot

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